SOMMAIRE PARTIE JURIDIQUE

Introduction

 

Chap 1. Définitions des activités

Introduction

S 1. Notions générales

S 2. Qualifications juridiques des activités

S 3. Qualification des activités touristiques

 

Chap 2.  Formalités de déclaration

Introduction

S 1. Centres de formalités des entreprises

S 2. Répertoires professionnels

S 3. N° SIREN, SIRET et code APE

S 4. Activités exercées par les agriculteurs

 

Chap 3. Urbanisme et construction

Introduction

S 1. Constructions en milieu rural

S 2. Sécurité incendie (ERP)

S 3. Accessibilité des handicapés

 

Chap 4. Infos des consommateurs

Introduction

S 1. Signalisation touristique

S 2. Publicité des prix

S 3. Facturation des prestations

S 4. Publicité mensongère et mentions

S 5. Utilisation d'une marque

S 6. Droits des consommateurs

 

Chap 5. Réglementation sanitaire

Introduction

S 1. Principes de la réglementation

S 2. Commerce de détail et intermédiaires

S 3. Formation à l'hygiène

S 4. Chambres d'hôtes

S 5. Tueries d'animaux

 

Chap 6. Statuts de l’entreprise

Introduction

S 1. Statuts et activités commerciales

S 2. Statuts et activités agricoles

S 3. Synthèse des sociétés et groupements

 

Chap 7. Règles des activités

Introduction

S 1. Hôtellerie de plein air

S 2. Locations de logements meublés

S 3. Chambres et tables d'hôtes

S 4. Activités équestres

S 5. Accueil enfants - Fermes pédagogiques

 

Chap 8. Réglementations diverses

Introduction

S 1. Responsabilité et assurances

S 2. Débits de boissons

S 3. Statuts des baux immobiliers

S 4. Vente de voyages ou de séjours

S 5. Lutte contre le tabagisme

S 6. Paiement par chèques-vacances

S 7. Déclaration des touristes étrangers

S 8. Sécurité des aires de jeux

S 9. Réglementation des piscines

S 10. Utilisation de titres-restaurant

S 11. Fonds et clientèle

S 12. Activités des agents publics

S 13. Paracommercialisme

S 14. Droit de la concurrence

S 15. Création et gestion de site internet

S 16. Réglementation économique agricole

S 17. Aides à la création d'entreprise

S 18. Diagnostics techniques immobiliers

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Partie 1. LES ASPECTS JURIDIQUES DU TOURISME RURAL

 

Chapitre 4. La promotion et l’information auprès des consommateurs

 

Section 4. La publicité mensongère et l’utilisation de certaines mentions valorisantes

 

1. Protection des consommateurs contre les allégations mensongères

La publicité consiste en toute forme de communication réalisée notamment dans le cadre d'une activité professionnelle dans le but de promouvoir la vente de biens ou de services. Plus qu'un simple moyen d'information, la publicité a pour objectif de séduire les consommateurs en mettant en avant certaines caractéristiques des biens et des services proposés. Outil de persuasion ou de séduction, la publicité ne doit pas pour autant être erronée et abusive en induisant les consommateurs en erreur. L'information publicitaire se doit d'être exacte et loyale. Elle doit permettre aux consommateurs de se faire une opinion objective sur les résultats ou les qualités des biens et des services proposés.

Afin de sanctionner les abus de professionnels peu scrupuleux, le législateur a institué les délits de publicité mensongère (désormais dénommée pratique commerciale trompeuse) et de tromperie passibles de sanctions pénales prononcées en première instance par les tribunaux correctionnels (§ 1).

Ainsi, l'emploi des termes ferme ou fermier ne doit pas être abusif au risque sinon de faire l'objet de poursuites au titre du délit de publicité mensongère (§ 2).

Enfin, certaines dénominations utilisées dans le secteur du tourisme rural font désormais l’objet d’une définition jurisprudentielle (§ 3).

 

§ 1. Les délits de pratique commerciale trompeuse et de tromperie

§ 2. Les conditions juridiques d'emploi des termes "ferme" ou "fermier"

§ 3. L’utilisation d’autres mentions valorisantes

  

§ 1. Les délits de pratique commerciale trompeuse et de tromperie

 

2. Pratique commerciale trompeuse (anciennement dénommée publicité trompeuse ou publicité mensongère)

Selon l'article L. 121-2 du code de la consommation, est interdite toute publicité comportant, sous quelque forme que ce soit, des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur, lorsque celles-ci portent sur un ou plusieurs des éléments suivants : existence, nature, composition, qualités substantielles, teneur en principes utiles, espèce, origine, qualité, mode et date de fabrication, propriété, prix, conditions de vente, conditions d'utilisation, résultat attendu, identité, qualité ou aptitude du fabricant, des revendeurs, des promoteurs ou des prestataires.

(note n° 2009-07 de la DGCCRF du 29/01/2009)

(V. aussi le site internet de la DGCCRF : http://www.economie.gouv.fr/dgccrf/publication/vie-pratique/fiches-pratiques/pratiques-commerciales-trompeuses).

Cette définition est suffisamment large pour sanctionner toutes formes de message dont le contenu ne correspondrait pas aux différentes caractéristiques des biens et services faisant l'objet de la publicité. L'ensemble des supports pouvant servir aux messages publicitaires est visé par cette définition.

Il s'agit donc autant des supports écrits (emballage, étiquetage, documents contractuels, prospectus, catalogues, annuaires, marques, encarts dans les journaux...) que des supports verbaux (radio, télévision...).

La loi du 22 juillet 2009 de développement et de modernisation des services touristiques a complété ce dispositif en précisant que l’usage des dénominations et appellations réglementées du code du tourisme de nature à induire le consommateur en erreur est puni des mêmes sanctions que celles applicables aux pratiques commerciales trompeuses telles que prévues par le code de la consommation (art. L. 327-1 du code du tourisme).

La diffusion d’une pratique commerciale trompeuse constitue un délit passible de sanctions pénales prononcées en première instance par les tribunaux correctionnels (V. ci-après). La sanction de ce délit ne nécessite pas la preuve de l'intention de tromper ou la mauvaise foi. Autrement dit, le fait même de recourir à une pratique commerciale trompeuse permet d'établir l'existence de l'infraction.

 

3. Répression des pratiques commerciales trompeuses

Ces pratiques sont le plus souvent constatées par les agents des administrations compétentes au moyen de procès-verbaux. Sont notamment compétents les agents des Directions départementales de la protection de la population (anciennement Directions départementales, de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes DDCCRF). Les procès-verbaux sont ensuite transmis au Procureur de la République qui peut décider  soit du classement pur et simple s'il estime que l'infraction n'est pas établie, soit de conclure à des poursuites judiciaires.

Dans cette seconde hypothèse, l'infraction supposée étant un délit, l'affaire est examinée par le tribunal correctionnel.

Le tribunal compétent peut décider :

- soit de la relaxe de l'annonceur considérant que le délit n'était pas constitué ;

- soit de la condamnation de l'annonceur jugé coupable à une peine pénale. L'annonceur peut être condamné au paiement d'une amende jusqu'à 300 000 €, voire éventuellement à un emprisonnement jusqu'à 2 ans (art. L. 132-2 et s. du code de la consommation). Ces sanctions très fortes ne sont prononcées que pour les infractions les plus graves.

Le tribunal peut également prononcer des peines complémentaires qui peuvent être :

- la publication du jugement dans les journaux ou revues indiqués par la décision judiciaire aux frais du condamné ;

- la diffusion aux frais du condamné d'une ou plusieurs annonces rectificatives.

Par ailleurs, le tribunal peut prononcer des sanctions civiles sous la forme d'allocations de dommages-intérêts à la demande de personnes tierces qui se seraient constituées partie civile (syndicats professionnels, associations de consommateurs...) du fait du préjudice subi. Le jugement prononcé par le tribunal correctionnel peut éventuellement  faire l'objet d'un recours auprès de la cour d'appel. Cet appel peut être formulé soit par les personnes condamnées estimant la sanction injustifiée ou trop sévère, soit par le Procureur de la République, estimant la décision du tribunal trop clémente (relaxe ou faibles peines).

 

3. Notion de tromperie

La tromperie est définie par les articles L 441-1 et suivants du code de la consommation (issus de la loi 01/08/1905 sur les fraudes et falsifications). Ces dispositions précisent que toute personne qui aura trompé ou tenté de tromper un contractant sur la nature, l'espèce, l'origine, les qualités substantielles ou la composition de toutes marchandises sera punie d'une amende voire d'un emprisonnement.

 

§ 2. Les conditions juridiques d'emploi des termes "ferme" ou "fermier"

 

3. Observations générales

Les termes "ferme" ou "fermier" constituent sans aucun doute des mentions valorisantes sur le plan commercial pour les agriculteurs qui souhaitent vendre leur propre production ou proposer des prestations qui ont un lien direct avec leur activité agricole.

Ces termes peuvent ainsi être utilisés pour la vente de produits alimentaires d'origine animale ou végétale (produits fermiers ou de la ferme) ainsi que pour les prestations de restauration (ferme auberge, goûters à la ferme), d'hébergement (ferme de séjour, camping à la ferme) ou de loisirs (ferme équestre). Toutefois, ces mentions valorisantes ne font l'objet d'aucune définition juridique générale sur le plan législatif ou réglementaire afin de délimiter leur usage et pour distinguer les productions fermières des productions non fermières.

Il est incontestable que les termes "ferme" ou "fermier" permettent une distinction valorisante des produits ainsi qualifiés des produits plus génériques ou de masse résultant de processus de production intensifs. Autrement dit, un certain consensus se dégage pour considérer que si tous les produits fermiers sont des produits agricoles, tous les produits agricoles ne sont pas nécessairement des produits fermiers.

Plusieurs textes précisent les conditions d'utilisation de ces termes mais leur portée juridique apparaît le plus souvent limitée et partielle. La Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF) fait valoir son point de vue sous la forme d’avis administratifs. Enfin, les juridictions compétentes élaborent progressivement une jurisprudence. Il convient donc de faire la synthèse de ces différentes sources d'origine légale, réglementaire, jurisprudentielle et doctrinale précisant les conditions d'emploi de ces termes "ferme" ou "fermier".

 

4. Absence de définition juridique générale

A ce jour, aucune disposition du droit positif, tant sur le plan communautaire que français, ne comporte une définition précise à vocation générale sur les conditions d'utilisation des termes "ferme" ou "fermier". La loi d’orientation agricole du 9 juillet 1999 a toutefois prévu la parution d’un décret. Selon l’article L. 641-19 du code rural, l’utilisation du qualificatif "fermier" ou de la mention "produit de la ferme" ou de toute dénomination équivalente est subordonnée au respect des conditions fixées par décret (dont la parution annoncée semble bien compromise). Prévu depuis plus de 20 ans, ce décret n'a toujours pas été publié !?

L'intention de sa publication semble désormais abandonnée bien qu'en réponse à une question parlementaire formulée par un député qui s'inquiétait de l'absence de publication du décret prévu par la loi de 1999, le ministère de l'Agriculture avait confirmé l'intérêt de ce texte réglementaire en précisant ainsi que "l'objectif recherché par un tel décret est d'éviter que l'emploi de cette mention valorisante ne soit dévoyée, utilisée abusivement, ruinant ainsi les efforts développés par ceux qui ont fait ce choix de système de production" (RM Morel-A-L'Huissier, JOAN 03/11/2003, p. 8412, n° 13558). Le ministère avait complété son analyse en indiquant que "la portée de ce décret sera d'en clarifier les conditions d'utilisation sans léser les opérateurs engagés dans ces démarches depuis longtemps. Ce dosage entre cohérence et réalisme pour la définition de nouvelles règles nécessite de prendre un temps suffisant pour la réflexion et la concertation. Par ailleurs il s'agit aussi d'anticiper sur les attentes des consommateurs. Enfin cette réflexion devra s'inscrire dans l'analyse plus globale initiée sur la valorisation des produits agricoles".  Vaste programme …

A défaut de dispositions réglementaires, l'analyse de la DGCCRF sur ce sujet apparaît fort judicieuse lorsque cette administration a précisé ainsi que "à terme, le public, mais également les institutions, notamment judiciaires, seront de plus en plus sensibles aux mentions faussement valorisantes faisant référence à un mode de production traditionnel ou à l'ancienne ou donnant une idée ou une image erronée de la manière dont est obtenu le produit. Il existe, en effet, pour les produits alimentaires, une contradiction en matière de communication : l'image qui en est donnée tend à mettre en valeur des modes de production traditionnels alors même que la plus grande partie de la production est industrielle. Il serait souhaitable de réduire cet écart afin que la communication sur les modes de production corresponde davantage à la réalité. Dans le cas contraire, il est probable que les juridictions prendront les devants." (formulation supprimée du site internet de la DGCCRF).

 

5. Des définitions réglementaires par type de production

 

a. Les productions réglementées dans le cadre des signes officiels de qualité (AOC, labels)

Les produits vendus avec la reconnaissance d'un signe officiel de qualité que sont notamment "l'appellation d'origine contrôlée" et "les labels rouges ou régionaux", peuvent prévoir l'utilisation des termes "ferme" ou "fermier". La production dans le cadre de ces signes officiels de qualité fait l'objet de procédures de contrôle auxquelles les pouvoirs publics sont très directement impliqués.

La reconnaissance officielle de ces modes de production permet un emploi strictement encadré des termes "ferme" ou "fermier". L'emploi de ces signes de qualité est soumis à l'application de cahiers des charges définissant les modes de production et de transformation et font l'objet de contrôles par des organismes tiers dûment habilités.

 

b. Les productions réglementées en dehors des signes officiels de qualité

 

1/. Les fromages

Les définitions, les dénominations, les traitements et les additions autorisés et les règles d’étiquetage concernant la production de fromages sont définies par le décret n° 2007-628 du 27 avril 2007 relatif aux fromages et spécialités fromagères.

Dans ce cadre, l’article 9-1 de ce décret précise que l’étiquetage des produits peut comporter le qualificatif ou la mention « fermier ou toute autre indication laissant entendre une origine fermière, lorsque le fromage est fabriqué selon les techniques traditionnelles par un producteur agricole ne traitant que les laits de sa propre exploitation sur le lieu même de celle-ci ».

Il est à noter que le dispositif admettant que lorsqu’un système d’identification des produits est mis en place, l’affinage des fromages fermiers peut être réalisé en dehors de l’exploitation agricole, a été annulé par le Conseil d’Etat par un arrêt en date du 28 octobre 2009 (CE, 28/10/2009, n° 307014). Pour le Haut Conseil, les dispositions admettant l’emploi du qualificatif fermier ou toute autre indication laissant entendre une origine fermière, dans les cas où l'affinage est réalisé en dehors de l'exploitation agricole à la ferme, à la seule condition qu'un système d'identification des produits soit mis en place, sont de nature à créer un doute dans l'esprit de l'acheteur ou du consommateur sur les caractéristiques du produit en question. Conformément à la requête de l’association requérante, le Conseil d’Etat a estimé à juste titre que le décret précité était entaché d’excès de pouvoir sur le point litigieux.

Pour faire suite aux critiques du Conseil d'Etat formulées par l'arrêt du 28 octobre 2009 (V. ci-dessus), un décret en date du 12 novembre 2013 a reprécisé la définition des fromages fermiers en mentionnant que : "La dénomination “fromage fermier” ou tout autre qualificatif laissant entendre une origine fermière est réservée à un fromage fabriqué selon les techniques traditionnelles par un producteur agricole ne traitant que les laits de sa propre exploitation sur le lieu même de celle-ci.

Lorsque l’affinage a lieu en dehors de l’exploitation, l’étiquetage doit comporter les mentions prévues au 5° du A de l’article 12 du décret du 27 avril 2007 qui précise en ces termes : " La mention " fabriqué à la ferme puis affiné par l'établissement " suivie du nom de l'affineur, dans le cas des fromages fermiers tels que définis à l'article 9-1 mais dont la phase d'affinage a été réalisée en dehors de l'exploitation agricole. Cette mention suit immédiatement la dénomination " fromage fermier ". La taille des caractères de ces mentions est identique."

Décret n° 2013-1010 du 12 novembre 2013 modifiant le décret n° 2007-628 du 27 avril 2007 relatif aux fromages et spécialités fromagères

MAJ  2020

L'article 6 de la loi n° 2020-699 du 10 juin 2020 relative à la transparence de l'information sur les produits agricoles et alimentaires précise désormais que « pour les fromages fermiers, lorsque le processus d'affinage est effectué en dehors de l'exploitation en conformité avec les usages traditionnels, l'information du consommateur doit être assurée en complément des mentions prévues au premier alinéa selon des modalités fixées par décret ». Après les différentes péripéties  judiciaires mentionnées ci-dessus, la loi du 10 juin 2020 affirme que désormais l’affinage des produits fermiers peut être effectué en dehors de l’exploitation (art. L. 641-19 modifié du code rural).

 

2/. Les volailles (coqs, poules, canards, oies, dindons, dindes et pintades).

S’agissant des élevages de volailles, les mentions "fermier - élevé en plein air" ou "fermier - élevé en liberté" ne peuvent en principe être utilisées que sur les volailles bénéficiant d'un label rouge, d'une appellation d'origine ou du signe "agriculture biologique" (art. L. 644-14 du code rural).

Toutefois, ces dispositions ne s'appliquent pas aux productions à petite échelle destinées à la vente directe ou locale mentionnées à l'article L. 654-3 du code rural. Cette dernière référence renvoie aux limites applicables aux tueries de volailles, soit un nombre d'animaux abattus ne dépassant pas 500 animaux par semaine et 25 000 par an.

 

3/. Les œufs

Le qualificatif "fermier", les mentions "produit de la ferme" ou "produit à la ferme" peuvent être apposés sur l'étiquetage ou la présentation des œufs de poules pondeuses de l'espèce Gallus gallus lorsque les conditions suivantes sont remplies :

- les poules pondeuses sont élevées selon le mode de production biologique ou selon le mode d'élevage traditionnel identifié par la mention "œufs de poules élevées en plein air" ;

- les céréales utilisées pour l'alimentation des poules pondeuses proviennent de l'exploitation agricole concernée ou d'exploitations agricoles situées dans le département de ladite exploitation ou dans les départements limitrophes.

Les œufs bénéficiant du qualificatif "fermier" ou des mentions "produit de la ferme" ou "produit à la ferme" sont issus d'exploitations répondant aux caractéristiques suivantes :

- le producteur est propriétaire des poules pondeuses assurant la production des œufs et est responsable de la conduite d'élevage ;

- la production d'œufs ne constitue pas la seule source de revenu du producteur ;

- le nombre de poules pondeuses présentes sur l'exploitation n'excède pas 6 000 ;

- les œufs sont ramassés et triés manuellement et quotidiennement soit directement dans les pondoirs, soit après leur évacuation directe des pondoirs jusqu'à une table de tri. Toute personne physique ou morale, quelle que soit sa forme juridique, qui participe à la production d'œufs de poules pondeuses de l'espèce Gallus gallus doit, préalablement à l'utilisation du qualificatif "fermier" ou des mentions "produit à la ferme" ou "produit de la ferme", en faire la déclaration au préfet du département.

(art. D. 641-57-1 et s. du code rural issu du décret n° 2009-247 du 2 mars 2009 relatif aux conditions d’utilisation des mentions valorisantes « fermier », « produit de la ferme » ou « produit à la ferme » pour les œufs de poules pondeuses de l’espèce Gallus gallus ; arrêté du 25 mars 2009 fixant les modalités de la déclaration préalable à l’utilisation des mentions valorisantes « fermier », « produit de la ferme » ou « produit à la ferme » pour les œufs de poules pondeuses de l’espèce Gallus gallus ; circulaire DGPAAT/SDOE/C2009-3065 du 11 juin 2009 concernant l’utilisation de la mention « fermier » pour les œufs de poules pondeuses)

Sur ce point, il est à noter que le Conseil d’État a annulé le décret n° 2009-247 du 2 mars 2009 établissant pour les oeufs les conditions d’usage de la mention valorisante « fermiers ». Le Conseil d’État a en particulier remis en cause un des articles qui mentionne entre autres que « les céréales utilisées pour l’alimentation des poules pondeuses proviennent de l’exploitation agricole concernée ou d’exploitations agricoles situées dans le département de ladite exploitation ou dans les départements limitrophes ».

Le Haut Conseil a considéré que les requérants étaient « fondés à soutenir que ces dispositions qui notamment ne fixent aucune part minimale des céréales dans l’alimentation des poules ne définissent pas les conditions dans lesquelles les poules doivent être alimentées avec une précision et une rigueur suffisantes pour garantir, aux yeux des consommateurs, que cette alimentation soit compatible avec le caractère fermier des oeufs ». La haute juridiction a estimé que cette mention est de nature à créer un doute dans l’esprit de l’acheteur ou du consommateur sur le caractère fermier des oeufs. Dès lors, le décret est dans son ensemble entaché d’excès de pouvoir et annulé (CE 10/11/2010, n° 327507).

 

6. Positions de la DGCCRF

Parallèlement aux différents textes réglementaires et aux décisions de justice, la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF) fait valoir son analyse sous la forme d'avis et de recommandations. Cette position de l'administration ne constitue normalement qu'un commentaire, voire une interprétation des textes en vigueur.  

Toutefois, nul ne peut nier l'importance de la doctrine de l'Administration en raison des prérogatives dont celle-ci dispose pour initier les contentieux devant les juridictions pénales après l'établissement de procès-verbaux transmis au Parquet. La DGCCRF a ainsi précisé sa position sur les conditions d'emploi du terme "ferme" dans un article sur les allégations dans le secteur alimentaire (BID, n°12/1992, p. 51 et s). Selon cet article, la mention "fermier" doit correspondre à des produits préparés à la ferme (exploitation agricole) à une échelle non industrielle sauf lorsque la réglementation prévoit des dispositions particulières (V. réglementations applicables aux volailles sous labels et aux fromages).

L'Administration a par ailleurs précisé dans un autre dossier (BID, n°1/1992, p. 10) que le "miel fermier" constituerait une distinction abusive car le statut d'agriculteur du propriétaire des ruches n'a aucune influence sur la qualité du miel, qui ne peut être distingué des produits récoltés dans des conditions similaires (V. également note d'information n° 1998-62 du 15/04/1998 concernant l'emploi du terme fermier).

 

7. Exemples jurisprudentiels : publicité mensongère et produits fermiers

 

a. Arrêt de la Cour de cassation du 28 mai 1974

La Cour a rejeté le pourvoi formé par une coopérative condamnée pour publicité mensongère en première instance qui avait déposé une marque comportant le terme "fermier" et qui commercialisait des poulets dits fermiers. La Cour confirme la décision du Tribunal rendu en premier et dernier ressort en considérant que "la marque ainsi déposée était de nature à créer une confusion dans l'esprit de l'acheteur, en laissant croire à celui-ci qu'il s'agissait de poulets fermiers, c'est-à-dire élevés à la ferme, alors qu'ils provenaient, pour la plupart, d'élevages industriels."

 

b. Arrêt de la cour d'appel d'Agen du 8 octobre 1992

La Cour a confirmé le jugement prononcé par un tribunal correctionnel à l'encontre d'une société commerciale dénommée "Fermiers Réunis" qui vendait des foies gras alors que les produits transformés par cette entreprise ne provenaient plus exclusivement de la production des associés de ladite société. Selon la cour d'appel, "le qualificatif fermier implique l'existence d'un circuit intégré sur la ferme, étant précisé que les préparations sont réalisées suivant des méthodes traditionnelles, que ce caractère fermier s'induit en outre d'une production ayant ces caractéristiques mais également d'une commercialisation sur place, à la ferme ou sur les marchés."

 

c. Jugement du tribunal correctionnel de Strasbourg du 12 décembre 1980

Ce tribunal a condamné une entreprise productrice d'œufs dont la dénomination comportait le terme "La ferme M." et qui commercialisait ses produits dans des emballages comportant des illustrations faisant croire à une origine fermière. Les juges, ayant constaté que l'entreprise était en fait un centre industriel de production et de conditionnement d'œufs, de mode intensif, dans lequel un nombre très élevé de poules étaient maintenues en claustration permanente et nourries exclusivement d'aliments industriels, ont considéré que l'illustration figurant sur les emballages et l'usage de la marque avec le terme "ferme" constituaient une publicité de nature à induire en erreur les consommateurs.

 

d. Arrêt de la cour d'appel de Bordeaux du 7 juillet 1993

La Cour a condamné un agriculteur exerçant une activité de restauration sur son exploitation qui utilisait la dénomination "Ferme-Auberge" considérant que l'emploi du terme ferme était constitutif du délit de publicité mensongère du fait que l'intéressé s'approvisionnait principalement à l'extérieur de son exploitation. Selon les juges, la publicité annonçant une ferme-auberge était de nature à induire le public en erreur sur des éléments substantiels de la prestation à savoir la provenance et le mode d'obtention des produits offerts à la consommation. La Cour a ainsi précisé que le fait que les produits soient cuisinés et servis directement par celui qui les a obtenus par son travail et a contrôlé l'élaboration de la matière première culinaire constitue un élément essentiel du choix fait par les clients d'une ferme-auberge plutôt que d'un établissement ordinaire mettant en œuvre des produits acquis dans les circuits commerciaux.

 

e. Arrêt de la cour d'appel d'Amiens du 25 septembre 2001

Par un arrêt en date du 25 septembre 2001, la cour d'appel d'Amiens a rappelé que l'emploi du terme fermier ne doit pas être associé à un mode de production intensif. En l'espèce, une société commercialisait des œufs sous la marque "Ferme du pré" alors que les animaux étaient élevés en claustration permanente dans des cages éclairées à heure fixe pour régulariser la ponte et nourris exclusivement d'aliments industriels. Pour les juges, l'emploi de cette marque était constitutif du délit de publicité mensongère dès lors qu'en réalité il ne s'agissait pas d'une production fermière traditionnelle. Le producteur concerné a été condamné au paiement d'une amende de 15 000 francs.

 

8. Emploi du terme ferme auberge

 

a. Définition administrative

Par un courrier du 18 juillet 1995 adressé à l’APCA, la DGCCRF a précisé les différentes modalités d'approvisionnement et de contrôle des fermes auberges. Afin de préciser les modalités d'approvisionnement des fermes-auberges, l'administration distingue quatre catégories de produits :

- les produits provenant de l'exploitation du fermier aubergiste. Cet approvisionnement doit être substantiel et fermier, la traçabilité doit être fiable ;

- les produits acquis à l'extérieur de l'exploitation, soit auprès d'autres agriculteurs (dans ce cas, les produits doivent être fermiers et les producteurs identifiés), soit auprès de fournisseurs non agriculteurs. Cet approvisionnement doit être exceptionnel. Il peut s'agir de produits constitutifs de plats principaux (viandes, poissons, fromages notamment) si ces derniers correspondent à une tradition gastronomique locale ;

- les produits élémentaires. Il s'agit de produits génériques et non valorisants (sel, épices, pain, farine, produits gras...) qui peuvent être acquis auprès de tous fournisseurs ;

- les boissons doivent provenir de la région ou des régions voisines de chaque fermier-aubergiste. Les vins mousseux locaux doivent être valorisés en priorité.

S'agissant des modalités de contrôle des fermes-auberges, l'Administration indique que tout lieu de restauration utilisant le mot "ferme" doit faire l'objet des mêmes contrôles que les fermes-auberges utilisant la marque des chambres d'agriculture "Bienvenue à la Ferme" sur la base des mêmes critères.

Cette définition administrative du terme ferme auberge a été expressément confirmée par un arrêt de la Cour de cassation présentée ci-après.

 

b. Arrêt de la Cour de cassation du 25 novembre 1998

La Cour de cassation a rejeté le pourvoi d’une personne qui se prétendait fermier-aubergiste en précisant que la cour d’appel de Lyon avait valablement condamné la personne concernée sur la base du délit de publicité mensongère. Les juges d’appel avaient précisé que si l’appellation de ferme-auberge ne fait l’objet d’aucune réglementation, cette dénomination suppose pour le consommateur moyen que les produits alimentaires cuisinés et servis à l’auberge proviennent essentiellement de la ferme, l’auberge devant être implantée sur le même site ou à proximité immédiate de la ferme.

Selon les juges, l’origine des matières premières entrant dans la composition des plats constitue un facteur déterminant de la fréquentation d’une ferme-auberge par la clientèle. En l’espèce, l’intéressé proposait des menus qui étaient pour plus de 85 %, préparés à base de denrées ne provenant pas de la ferme, ni même de producteurs locaux voisins, mais de circuits commerciaux traditionnels, voire de grossistes.

La personne concernée a été condamnée pour publicité de nature à induire en erreur à 8 mois d’emprisonnement avec sursis, 30 000 francs d’amende et la publication de la condamnation dans deux journaux locaux (Cass. 25/11/1998, n° 97-86245).

 

§ 3. L’utilisation d’autres mentions valorisantes

 

9.  Chambres et tables d’hôtes

La notion de table d’hôtes ne fait pas l’objet d’une définition réglementaire comme cela est le cas désormais pour les chambres d’hôtes. Toutefois, selon une réponse écrite du secrétariat d’État au Tourisme, ces activités doivent cependant respecter les règles de la concurrence vis-à-vis de l’hôtellerie-restauration professionnelle et répondre à quatre conditions particulières. Ainsi, la table d’hôte doit être un complément de l’hébergement, avoir un seul menu et une cuisine de qualité, des repas pris à la table familiale et une capacité limitée à vingt personnes (en réalité 15).

Plusieurs réponses ministérielles ont confirmé cette solution (RM Bapt, JOAN 26/04/1999, n° 24950 ; RM Lepetit JOAN 5/10/2010, n° 84529).

Ces particularités ont été confortées par plusieurs tribunaux sur le fondement de la publicité mensongère.

Ainsi, la cour d’appel d’Aix-en-Provence a condamné, pour délit de publicité de nature à induire en erreur les consommateurs, un restaurateur qui utilisait abusivement la qualification "tables d’hôtes" alors qu’il pratiquait plusieurs menus par service, servis sur plusieurs tables, la restauration étant sans hébergement. De plus, l’intéressé utilisait sans accord la marque "Gîtes de France". La personne concernée a été condamnée à 20 000 francs d’amende, la publication de la condamnation dans deux journaux locaux et 3 000 francs de dommages-intérêts au profit de l’association départementale des gîtes de France qui s’était constituée partie civile (CA Aix-en-Provence,  09/12/1998, n° 98-822).

 

10. Produits fait maison

Afin d'assurer la qualité et la transparence dans l'élaboration des plats proposés dans le cadre d'une activité de restauration commerciale, l'article 7 de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation précise que les personnes ou entreprises qui transforment ou distribuent des produits alimentaires dans le cadre d'une activité de restauration commerciale ou de vente à emporter de plats préparés, permanente ou occasionnelle, principale ou accessoire, précisent sur leurs cartes ou sur tout autre support qu'un plat proposé est "fait maison”.
Ces dispositions sont codifiées sous les
articles L. 122-20 et suivants du code de la consommation.

Le décret n° 2014-797 du 11 juillet 2014 relatif à la mention « fait maison » dans les établissements de restauration commerciale ou de vente à emporter de plats préparés précisent les modalités d'application de ce dispositif. Ces dispositions sont codifiées sous les articles D. 122-1 et s. du code de la consommation.

Sur ce sujet, il est utile de consulter le site officiel d’information de la mention « fait maison ».

V. notamment le GUIDE D’UTILISATION DE LA MENTION «FAIT MAISON» EN RESTAURATION à destination des professionnels

 

11. Aires naturelles de camping

Une personne qui a été autorisée à exploiter une aire naturelle de camping limitée à 25 emplacements et 85 personnes et qui ne respecte pas ces limites en procédant à une sur-occupation des lieux est coupable du délit de tromperie sur les qualités substantielles du camping, sachant de plus que les équipements sanitaires ne correspondaient pas aux exigences réglementaires (Cass. crim., 24/06/1998, n° 97-83716).

 

 

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